Qu'est-ce que le droit de préemption du locataire ?

Lorsque vous souhaitez mettre en vente votre bien en location. Il y a un élément à ne pas oublier à votre locataire. Vous avez l’obligation de l’avertir et de lui proposer à l’achat. Explications.
Est-ce qu'un locataire est prioritaire en cas de vente ?
Oui tout à fait. Si vous êtes propriétaire d’un bien en location et que vous souhaitez le vendre. Vous êtes d’abord obligé d’en avertir le locataire et de lui proposer le logement à l’achat, cela s’appelle le droit de préemption. Toutes les ventes immobilières d’un bien loué n'impliquent pas l’existence d’un droit de préemption. Ce droit fonctionne dans des conditions et des modalités bien définies.
La définition du droit de préemption
Le droit de préemption est l’avantage donné au locataire d’acheter le bien dans lequel il se situe. Cela lui donne l’opportunité de devenir propriétaire et d’accéder à la propriété. Ainsi, tout locataire doté d’un contrat de location a la priorité pour acheter le logement dans lequel il réside. L’État a ainsi cherché à encourager l’accession à la propriété et l’achat de leur résidence principale par les locataires.
Il faut noter qu'il existe aussi beaucoup de possibilités de préemption de la part de la mairie sur lesquelles on ne revient pas ici. Il s'agit de biens immobiliers situés dans des espaces naturels sensibles, dans les zones d'aménagement différé, selon le PLU (plan local d'urbanisme). (article L210-1 du Code de l'urbanisme).
Les conditions d’application du droit de préemption
La loi n°75-1351 du 31 décembre 1975 puis la loi Alur sont venues préciser les contours de ce dispositif et le cadre qui régit le droit de préemption du locataire.
Dans le cas de la mise en vente de son bien immobilier. La propriétaire doit fournir une offre de vente au locataire et lui donner tous les renseignements sur les conditions de vente. Le locataire dispose d’un délai de réflexion avant de remettre son avis au propriétaire pour lui signifier ou non son intérêt.
Les conditions de préemption varient selon la nature du bien et le type de vente. Dans le cas d’une division ou subdivision d’immeuble, de vente en bloc d’immeuble, de location de courte durée, de vente à un membre de sa famille, les modalités du droit préemption ne sont pas les mêmes. Aussi, il convient de revenir en détail sur chacune des situations pour bien saisir les enjeux autour de ce droit. D’autant que la loi Alur et la loi Pinel ont apporté des nouveaux éléments à prendre en compte.
Depuis la loi Alur il est ainsi spécifié que le vendeur doit fournir au locataire tous les éléments entourant la vente, le prix, les conditions. De manière globale, les délais de préemption ont été allongés. L’encadrement de la communication autour de la vente est aussi plus stricte. Le propriétaire doit aussi avertir la mairie de son intention de vente, cette dernière dispose d'un droit de préemption.
Attention, si le bien immobilier est vendu loué, dans ce cas, il n’y a pas de droit de préemption. Le propriétaire suivant récupère simplement le bail en cours et le locataire avec.
Quelle est la procédure du droit de préemption ?
Le droit de préemption pour le locataire est loin d’être absolu et ne peut fonctionner que sous certaines conditions. On distingue ainsi 3 grandes situations où le droit de préemption s’applique :
- Le congé pour vente ;
- La division et subdivision d’un immeuble ;
- La vente en bloc dans un immeuble plus de 5 logements.
Il existe un droit de préemption pour les garages et locaux à usage commercial mis en place dans le cadre de la loi Pinel.
Le congé pour vente, la situation la plus courante
Il s’agit de la procédure la plus courante, le congé pour vente. En tant que propriétaire, vous souhaitez mettre en vente votre logement qui est loué. Vous devez donc adresser à votre locataire un congé pour vente. Ce congé doit être notifié au locataire 6 mois avant la date d’échéance à laquelle expire le bail.
L’avis doit être remis soit par lettre avec accusé de réception, par un commissaire de justice ou remis en main propre contre émargement et récépissé signé. Lorsqu’il reçoit l’avis, le locataire a 2 mois pour répondre (à savoir accepter ou refuser l’achat du logement).
Dans cette demande de congé pour vente, il doit être explicitement indiqué :
- Le motif du congé, dans le cas présent pour vendre le bien ;
- Le prix et les conditions de vente du logement et de ses annexes le cas échéant ;
- Une description précise du logement et des annexes ;
- Rappeler les 5 premiers alinéas du II de l'article 15 de la loi du 6 juillet 1989, qui indiquent les conditions de l'offre de vente au locataire.
Comment informer le locataire de la vente du logement ?
Si vous souhaitez vendre votre maison ou votre appartement, il est bon de connaître les procédures, qui varient selon les cas.
Vous pouvez attendre la fin du bail et mettre en vente après que le locataire a quitté les lieux. Il faut pour cela le signifier au locataire au moins 6 mois avant la fin du bail. Vous devez remettre un courrier avec accusé de réception ou en main propre au locataire.
Avant la fin du bail. Le propriétaire peut mettre en vente son logement, mais il doit le signifier au locataire. Dans ce cas, le locataire n’a aucune démarche particulière à faire, puisque le bail en cours est transféré au nouveau propriétaire. Le locataire peut se porter acquéreur du logement, mais à la manière de n’importe quel particulier sur le marché immobilier.
Le droit de préemption du locataire lors d’une vente en bloc
La vente en bloc correspond à la vente d’un immeuble en entier à un seul acquéreur. Cela donne au locataire d’un des lots de l’immeuble le droit de préemption pour acheter l’immeuble. Il doit disposer de toutes les informations, pour pouvoir aussi, en faire l’achat.
Le droit de préemption lors d’une vente concernant la division ou subdivision d’un immeuble
La division ou la subdivision correspond au découpage d’un bien immobilier en plusieurs lots d’habitation distincts. On pense, par exemple, au cas de grands immeubles qui sont découpés en plusieurs appartements.
Pour que le droit de préemption s’active, il est nécessaire que :
- Le locataire est une personne physique ;
- Le logement vendu est à usage d’habitation ou mixte ;
- Tous les locataires doivent être avertis individuellement des conditions de vente du propriétaire.
Le locataire bénéficie ensuite d’un délai de 2 mois pour accepter ou refuser l’achat du bien.
Le droit de préemption pour un local commercial ou artisanal
La loi Pinel a défini depuis le 18 décembre 2014 un nouveau droit de préemption du locataire d’un local artisanal ou commercial. Les locaux à usage de bureaux ou encore les entrepôts en sont exclus. Toutes ces dispositions sont précisées dans l’article L145-46-1 du Code du commerce.
Ainsi, lorsqu’il envisage la vente de son local, le propriétaire doit en informer le locataire par lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou remise en main propre contre récépissé ou émargement. Le locataire bénéficie ensuite d’un délai d’un mois à compter de la réception de cette offre pour se prononcer, puis de 2 mois pour conclure son achat.
Plusieurs types de locaux ne peuvent pas jouir du droit de préemption, notamment lorsque le local fait partie d’un ensemble commercial et que la vente concerne tout l’immeuble. Ou bien encore si la vente est à destination d’un parent du bailleur.
Quelles sont les exceptions au droit de préemption du locataire ?
Le droit de préemption est un moyen intéressant à disposition des locataires pour devenir propriétaire. Toutefois, ce droit est limité par plusieurs dispositions et dans certains cas particuliers, il ne s’applique pas.
- Lorsque le bien est vendu loué et le bail n’arrive pas à échéance. Le bail en cours est alors transféré au nouveau propriétaire sans que le locataire puisse acheter le bien, sauf par la voie classique. Le bail se poursuit dans les mêmes conditions de loyers et de durée.
- Lors d’une vente à un parent. Le propriétaire n’est pas tenu de respecter le délai de préemption s’il vend le logement à un membre de sa famille, et ce, jusqu’au 3e degré de parenté inclus. Le but est de faciliter la transmission de patrimoine à l’intérieur des familles.
- Lors d’une vente d’un appartement qui est une location saisonnière ou une location meublée. Dans ce cas, le droit de préemption n’est pas prévu par la législation. Ce droit ne concerne de facto que les locations nues.
- Si le bail expire. Lorsque le bail arrive à son terme et qu’il n’est pas renouvelé, le propriétaire n’est pas tenu d’appliquer le droit de préemption. Il peut simplement récupérer son logement pour le mettre en vente.
- Si le logement est insalubre ou délabré. En somme, quand le logement présente un risque pour la sécurité ou la santé des habitants, il ne doit pas leur être proposé à l’achat.
- Lors d’une division importante de propriété et que le locataire n’occupe pas la partie qui est vendue.
- Lors d’une vente en viager puisque le vendeur ne quitte pas son logement.
- Lors d’une vente aux enchères, le droit de préemption ne fonctionne pas non plus.
- D’autres circonstances exceptionnelles. Plusieurs situations peuvent suspendre le droit de préemption, comme une saisie immobilière ou une liquidation judiciaire.
Quelles conséquences en cas de non-respect du droit de préemption ?
Ne pas respecter le droit de préemption du locataire, en tant que propriétaire, c'est s'exposer à des sanctions légales. Des sanctions qu’il est simple d’éviter en avertissant son locataire.
Le premier risque est la nullité de la vente. Ce fut rappelé dans un arrêt de la Cour de cassation du 11 octobre 2018. Le locataire qui n’a pas été averti est donc légitime pour intenter une action en justice et faire annuler la vente du logement.
L’autre risque lorsque les délais de préavis de vente ne sont pas respectés est l’amende. Depuis la loi Alur, l’amende pénale peut atteindre 6 000 euros pour une personne physique et 30 000 euros pour une personne morale. Tout dépend de la gravité du préjudice causé.
Enfin, le locataire est aussi en droit de demander des dommages et intérêts du propriétaire en cas de non-respect de la procédure. Les dommages et intérêts peuvent correspondre aux frais de déménagement, au versement de la différence entre le loyer initial et le loyer demandé par le nouveau propriétaire.
Peut-on vendre un appartement loué ?
Oui, bien sûr. Vous êtes en droit de vendre votre appartement qui est déjà loué. Le locataire dans ce cas de figure ne dispose pas de droit de préemption. Le bail actuel est récupéré par le nouveau propriétaire qui devient alors le nouveau bailleur. Cette transmission du contrat de location se fait automatiquement et dans les mêmes conditions (durée, loyer, charges) que précédemment.
Cette solution présente plusieurs avantages : vous n'avez pas à attendre la fin du bail pour vendre, et le nouveau propriétaire bénéficie immédiatement des revenus locatifs. Il est important de noter que tous les documents liés au bail du locataire (état des lieux, dépôt de garantie, etc.) doivent être transmis au nouveau propriétaire lors de la vente.

