Fonds de travaux loi ALUR : est-il obligatoire ?
Cette disposition phare de la loi ALUR a récemment fêté son premier anniversaire : le fonds de travaux, obligatoire à partir de la cinquième année d’existence des copropriétés, est en vigueur depuis janvier 2017. On revient sur ses principales dispositions.
La loi pour l’accès au logement et un urbanisme rénové du 24 mars 2014, dite loi ALUR, comporte un certain nombre de mesures essentielles, dont certaines ont d'ailleurs été récemment retoquées par la loi. D'autres ont déjà un peu plus d'un an d'existence : c'est le cas de l'article 58, qui comporte l’obligation pour certaines copropriétés d’ouvrir un fonds de travaux. Cette mesure concerne depuis janvier 2017 les « immeubles à destination partielle ou totale d’habitation ».
A quoi sert le fonds de travaux ?
Il s'agit de constituer une provision pour éviter les « catastrophes » : absence de décision quant aux rénovations nécessaires, urgences imprévues, impayés. En rassemblant un fonds de ressources financières, les copropriétaires sont ainsi censés anticiper, et mieux supporter, le coût d'éventuels travaux.
Qui est concerné par le fonds de travaux ?
Toute copropriété construite avant le 1er janvier 2012, possédant au moins un lot destiné à l’habitation, est tenue de mettre en place un fonds de travaux. Cependant, des exceptions sont prévues :
- les copropriétés comportant moins de 10 lots – ce qui est le cas de la majorité des copropriétés en France (lot = logement, cave ou autre) peuvent voter en Assemblée générale contre l'obligation de ce fonds de travaux – l'unanimité est requise.
- les immeubles neufs sont dispensés de cette obligation pendant cinq ans après la réception des travaux.
- les copropriétés dont le diagnostic technique global (DTG) prouve que des travaux ne seront pas nécessaires durant les dix prochaines années peuvent également y échapper.
Quelle est la part du fonds de travaux dans le budget de la copropriété ?
Au moins 5 % du budget prévisionnel par an. Cela reste toutefois modeste : en moyenne, 100 € annuels. Le fonds peut toutefois être supérieur – son montant fait l'objet d'un vote à la majorité absolue des copropriétaires. Le montant ensuite alloué à un chantier ou à un autre dépendra d'un vote des copropriétaires à la majorité absolue (50 % + une voix de tous les copropriétaires, absents compris). Si la proposition est rejetée mais recueille au moins un tiers des voix, un nouveau vote à la majorité simple (50 % + une voix des copropriétaires présents) pourra être demandé.
Quand peut-on utiliser le fonds de travaux ?
Cette réserve financière sert exclusivement à financer les travaux prescrits par la loi et les règlements (arrêté préfectoral par exemple), ceux décidés en assemblée générale ainsi que ceux effectués dans l’urgence pour la sauvegarde de l'immeuble, ordonnés par le syndic sans l'aval de l'assemblée générale, par souci de rapidité. On pourra donc le débloquer pour financer des travaux qui ne sont pas compris dans le budget prévisionnel, concernant l'amélioration, la conservation ou l'entretien de l'immeuble (hors maintenance), ou portant sur des éléments d'équipement communs comme l'ascenseur, ainsi que les études techniques rendues nécessaires par ces différents chantiers.
Comment créer ce fonds de travaux ?
C’est au syndic d'inscrire la création du fonds de travaux à l’ordre du jour de l'Assemblée générale, et d'ouvrir et gérer un compte bancaire séparé dédié exclusivement à ce fonds de prévoyance. Le compte doit être distinct de celui du syndic et du compte dévolu au budget prévisionnel de la copropriété. Tous les copropriétaires doivent participer au financement du fonds de travaux à part égale. Néanmoins, la loi ne dit pas que les chantiers financés grâce à cette épargne doivent profiter de la même manière à tout le monde : certains copropriétaires pourraient se retrouver dans une situation où ils paieraient davantage qu'en l'absence de fonds de travaux, puisqu'ils n'auraient pas eu à contribuer à ces derniers... une situation qui pourrait déboucher sur des litiges judiciaires !
Quelle sanction en cas de défaut du fonds de travaux ?
Aucune sanction n'est prévue, ni pour les copropriétés ne constituant pas le fonds, ni pour celles qui le constitueraient à un taux inférieur au minimum légal. Seul un copropriétaire absent ou opposant peut saisir le tribunal, pour obtenir l’annulation de la décision écartant la création du fonds ou fixant un taux inférieur. Attention, faute d’ouverture d’un fonds de travaux dans les trois mois de sa nomination, le mandat du syndic encourt la nullité !
Que deviennent les cotisations versées au fonds de travaux en cas de vente ?
Les provisions versées au titre du fonds de travaux sont attachées au lot et non au copropriétaire. Elles ne sont donc pas remboursées par le syndic lorsque le copropriétaire vend son logement et quitte l'immeuble. Résultat, les cotisations du copropriétaire vendeur pourraient financer des travaux réalisés après son départ. Néanmoins, acheteur et vendeur pourront s'entendre à l'amiable sur ce sujet, à l'aide notamment de l'état daté des charges acquittées par le copropriétaire sortant. In fine, le coût des provisions versées pour le fonds de travaux pourrait par exemple être répercuté sur le prix de vente.
Que deviennent les cotisations en cas de non utilisation du fonds de travaux ?
Si l'épargne accumulée au fil des années n'est pas utilisée et finit par atteindre le montant du budget prévisionnel annuel, le syndic doit inscrire deux propositions à l'ordre du jour de l'assemblée générale : le lancement d'un plan pluriannuel de travaux et la suspension des cotisations. Si les copropriétaires refusent le plan pluriannuel, ils pourront donc arrêter d'alimenter le fonds de prévoyance. Autrement dit, l'année où l'épargne placée sur le fonds devient égale ou supérieure au budget prévisionnel annuel (5 000 euros par exemple), les copropriétaires ne seront plus obligés de cotiser à ce titre.