Vers une amélioration de la fiabilité des DPE

Restaurer la confiance dans les DPE, voilà l’objectif annoncé dès mars par la ministre du Logement. Au programme, deux nouveaux arrêtés pour sécuriser et renforcer la fiabilité du DPE publiés en juin.
Restaurer la confiance dans les DPE, voilà l’objectif annoncé dès mars par la ministre du Logement. Dans un contexte de fraude et d’escroquerie autour du DPE, et face à l’importance de ce diagnostic dans la location et la vente, le gouvernement est passé à l’action. Au programme, deux nouveaux arrêtés pour sécuriser et renforcer la fiabilité du DPE.
Fraudes au DPE, quelles conséquences ?
Combien de diagnostics de performance énergétique (DPE) frauduleux par an ? Difficile de répondre avec précision à la question. Le Conseil d’analyse économique (CAE) estimait récemment que la fraude touchait chaque année 68 000 DPE sur les 4 millions réalisés. Soit environ 1,7 % du total des DPE effectués dans le pays.
Il y a quelques mois, une vaste étude de la startup Krno, soulignait quant à elle que la fraude au DPE concernait en tout 1,3 million de logements ! Et l’impact financier serait de l’ordre de 21,4 milliards d’euros. En cause ? Les DPE de complaisance. Par exemple un DPE classé F et rehaussé à E si la marge est faible, etc.
Les DPE sont faits en général à la demande des vendeurs, les diagnostiqueurs n’ont affaire qu’à ces derniers. Si bien qu’ils peuvent être tentés d’aller dans le sens du vendeur en rehaussant l’étiquette énergétique quand celle-ci est dans la marge d’erreur. Une pratique pas vraiment légale qui coûterait des millions d’euros tous les ans.
Plusieurs enquêtes dans la presse et les journaux télévisés ont également montré combien il était facile de contacter un diagnostiqueur peu scrupuleux pour changer sa note. Beaucoup de propriétaires qui ne veulent pas faire de travaux de rénovation (notamment parce que leur bien est classé F ou G) ont pu avoir recours à cette technique.
Pourquoi la fiabilité du DPE est-elle aussi importante ?
Et bien parce que l’impact du diagnostic de performance énergétique s’avère déterminant, que ce soit sur le prix du bien, les aides à la rénovation possibles, le crédit immobilier, les interdictions à la location, la consommation énergétique attendue. Pour l’achat ou la location d’un bien, avoir un DPE en règle est donc une nécessité. Raison de plus pour limiter les fraudes et les erreurs. Pour être cet outil incontournable, le DPE doit être irréprochable.
Les nouvelles mesures qui augmentent la fiabilité du DPE
La publication de ces deux nouveaux arrêtés intervient dans le cadre du plan de restauration de la confiance dans le DPE. Un plan présenté le 19 mars 2025 par la ministre du Logement Valérie Létard qui entend en finir avec les pratiques peu scrupuleuses de certains diagnostiqueurs.
Un premier arrêté relatif aux méthodes et procédures applicables au diagnostic de performance énergétique et aux logiciels l'établissant.
Un second arrêté relatif aux critères de certification des diagnostiqueurs intervenant dans le domaine du diagnostic de performance énergétique, de leurs organismes de formation.
Alors quelles sont les principales mesures mises en place avec ces arrêtés.
L’utilisation de QR codes pour mieux encadrer le DPE
Tous les diagnostics de performance énergétique (DPE) devront présenter un QR code. L’acheteur, le vendeur ou le locataire pourront ainsi vérifier en scannant que le bien est présent dans la base de données de l’ADEME. Le QR code fera apparaître l’URL du bien concerné dans l’annuaire. Cette pratique devrait éviter de nombreuses fraudes et simplifier l’accès au DPE du bien concerné.
Comme l’explique l’arrêté, le diagnostiqueur thermique devra aussi présenter au commanditaire (ou son représentant) le QR code lors de sa visite. Ce dernier atteste que le diagnostiqueur dispose d’un certificat valide et qu’il est en droit d’exercer ce métier (validation auprès d’organismes de formation et d’accréditation). Cela permet aussi de vérifier l’identité du diagnostiqueur puisque le QR code sera visible sur sa carte professionnelle.
Un DPE seulement visible après enregistrement sur le site de l'ADEME
Autre point à souligner, les propriétaires qui réalisent le DPE n’obtiendront pas tout de suite l’étiquette énergétique. Ce qui permet aux diagnostiqueurs de ne pas subir de pression. Les propriétaires devront se rendre sur le site de l’ADEME (Agence de la transition écologique) pour découvrir l’étiquette qui leur a été attribuée. C’est le diagnostiqueur qui transmet les informations à l’Ademe.
Augmentation des contrôles des diagnostiqueurs
Le point important à retenir est l’attention portée par l’administration aux organismes de formation et aux diagnostiqueurs. L’arrêté du 16 juin vient compléter un précédent arrêté de 2021 portant déjà sur la question des certifications et formations.
Afin de garantir la confiance entre le grand public et les diagnostiqueurs, ces derniers sont mieux contrôlés en amont. De très nombreuses précisions sont apportées, notamment sur la certification de ces derniers par des organismes formateurs et le fait qu’ils soient aptes à réaliser des diagnostics en toute impartialité. De très nombreux cas de conflits d’intérêts avaient été aussi décelés entre des diagnostiqueurs et différents organismes de formation.
Un annuaire des diagnostiqueurs est mis en place avec la liste de tous les diagnostiqueurs certifiés. Une liste rendue publique par les services du ministre et qui permettra à chaque particulier de vérifier que son diagnostiqueur est bien reconnu. La liste de tous les organismes de formation certifiés est aussi rendue publique.
Les organismes réalisant des diagnostics doivent par ailleurs communiquer : “_la liste des personnes ayant fait l'objet d'une suspension, résiliation, réduction de domaine ou de mention, ou d'un retrait de certification depuis moins de vingt-quatre mois_” et ”_ainsi que le motif de cette décision_”.
Dans le cadre du nouvel arrêté paru en juin, les diagnostiqueurs vont subir une analyse statistique de leurs données publiées. Et des sanctions sont prévues si cette analyse relève des anomalies. À noter que l’analyse va s’effectuer via la puissance de traitement offerte par l’IA. Le but est de déceler parmi les millions de diagnostics réalisés, les diagnostiqueurs dont les étiquettes sont supérieures à la moyenne par région. Il sera aussi possible de déceler si le diagnostiqueur a réalisé deux DPE dans la même journée, mais dans des lieux différents, etc.
En cas de fraude avérée, les diagnostiqueurs seront inscrits sur une liste noire. L’inscription va désormais durer 18 mois au lieu de 6 mois et 24 mois en cas de récidive. Des amendes sont aussi prévues si le diagnostiqueur ne dispose pas de certification l’autorisant à réaliser des DPE, de 1 500€ à 3 000€ (lors d’une récidive). De nouvelles mesures pour lutter contre la fraude à venir
Plus de contrôle, plus de confiance
Les deux arrêtés mentionnés, que ce soit sur la systématisation du QR code ou la certification des diagnostiqueurs, sont deux premières pierres à l’édifice de la restauration de la confiance.
La ministre du Logement avait également annoncé en mars vouloir multiplier par 4 le nombre de contrôles des diagnostiqueurs. Dans l’idée, un diagnostiqueur devrait être contrôlé chaque année une fois. La création d’un ordre des diagnostiqueurs est toujours à l’étude, comme cela se fait dans d’autres professions du milieu (ex. comme chez les architectes ou les notaires) avec l’idée d’aller plus loin dans la professionnalisation et la qualification du personnel effectuant les diagnostics. Un système de géolocalisation doit aussi être mis en place, en clair le diagnostiqueur ne pourra rentrer le DPE dans la base de données que s’il s’est vraiment rendu à l’adresse.
Nul doute que le ministère devrait continuer à publier des arrêtés ou des décrets autour du DPE pour continuer à agir sur la fiabilité de cet outil.

